PROJECTION : Sarreguemines et sa région dans la tourmente 1937-1950

Du 18/09/2015 au 19/09/2015 à 20:00

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  • Salle de l'Hôtel de Ville - Sarreguemines
  • gratuit
  • Durée : Début de la projection : 20 h

Le film documentaire  : «  Sarreguemines et sa région dans la tourmente. 1937- 1950  » réalisé par Messieurs Jean Birckel et Daniel Collin s'appuie sur le fonds filmographique de Monsieur André Poinsignon, déposé aux archives municipales de Sarreguemines par sa petite-fille, Madame Anne-Claire Jung. Il s'est étoffé des interviews des derniers témoins oculaires de la période concernée  : Messieurs Fred Dietsch, Raymond Ensminger, Raymond Lehmann et Claude Rausch. Il a une durée de 3 heures.

Caméra au poing, André Poinsignon a été pendant 15 ans le reporter très scrupuleux des heures les plus lugubres et les plus éclatantes de Sarreguemines, au XXe siècle. Ce qui en fait un témoin privilégié quasi incontournable. Cameraman amateur habile et talentueux,  il nous a laissé des images saisissantes des événements marquants de la montée des périls, de la Drôle de Guerre, de l'Annexion de fait, de la Libération et de la Reconstruction. A notre connaissance, il n'existe pas de document similaire en France pour une ville de même importance. Monté chronologiquement, pourvu d'un commentaire historique, le film permet d'appréhender sous un angle tout à fait unique et original l'histoire mouvementée de notre région. 

Evénements familiaux (enterrement, mariage, communion, jeux domestiques) et manifestations officielles - tant civiles que religieuses - s'entremêlent gaillardement et donnent à l'ensemble un supplément d'âme. Il y a là une force d'évocation qui fait de ce témoignage historique un document ethnographique de tout premier plan  ; en d'autres termes, les films d'André Poinsignon ressuscitent des pans entiers d'un «  monde que nous avons perdu  ». 

Pendant la période d'avant-guerre, le cameraman affectionne tout particulièrement les grandes cérémonies patriotiques et les défilés militaires martiaux, annonciateurs d'événements gravissimes. A l'occasion, le Sarregueminois, un brin romantique, fait de petites incursions aux limites de la ville. Quand il le faut, il a aussi l'oeil pour le fait divers. Il filme par exemple l'accident du pompier Rausch, survenu en octobre 1938 lors de manœuvres devant l'immeuble Handel. Enfin, il est présent aux dernières heures de paix à un endroit où on ne l'attend pas et nous livre un scoop historique. Mû par une intuition prémonitoire, il couche sur la pellicule la phase de concentration du 507e régiment de Chars commandé par le colonel de Gaulle alors en partance pour la vallée de la Blies, sans doute du côté de Nomeny. 

De la Drôle de guerre - qu'il passe sur la terre de ses ancêtres, dans la vallée de la Seille -, il nous dresse surtout un tableau hallucinant des ruines à Puttelange, Rémering et Saint Jean-Rohrbach, suite aux combats sur la ligne Maginot aquatique.

C'est bien sûr l'Annexion de fait qu'il documente grandement et ce, d'une manière saisissante. Il ouvre cet épisode particulièrement tragique de l'histoire de Sarreguemines par un état des lieux et des scènes du Wiederaufbau de 1940. Comme il est aux avant-postes des grandes parades nazies, il permet de suivre l'inévitable embrigadement de la population locale dans les formations politiques. Dans le lot, l'Erntedankfest de Rohrbach-lès-Bitche constitue un morceau de choix. Mais c'est aussi le grand témoin des catastrophes qui s'abattent sur la ville. Il est là pour rendre compte du traumatisme le plus profond du siècle subi par la cité des faïences  : l'enterrement des victimes du bombardement du 4 octobre 1943. Il met ainsi à nu les horreurs abominables de toute guerre. Chose rarissime, il n'hésite pas à filmer les gens réfugiés dans le bunker et à sortir en pleine nuit pour suivre les impacts des bombes. Inspiré techniquement par la Deutsche Wochenschau, il nous fait vivre les dernières heures de l'annexion ponctuées de rencontres sportives interrégionales, de manœuvres militaires d'envergure et surtout de vastes rassemblements propagandistes.

Sans doute à court de pellicule, André Poinsignon n'offre que des images furtives de l'arrivée des Américains libérateurs. Qu'à cela ne tienne  ! Il relate de façon exhaustive la grande fête de la Libération du 10 mai 1945. Tout le département se retrouve à Sarreguemines. Autre manifestation symbolique d'action de grâce, la Fête-Dieu du 3 juin 1945 qui se déroule dans un champ de ruine  ! Enfin l'amateur éclairé est là - chose surprenante - pour filmer le retour tant attendu des malgré-nous libérés des camps soviétiques  !

La Reconstruction constitue le dernier volet de la trilogie filmographique. On sent le cinéaste sarregueminois habité d'une insatiable volonté de témoigner des grands chantiers en ville. Le pont des Alliés est au cœur de son projet documentaire. Il en décrit les phases successives avec une minutie de notaire. Jamais personne n'a mis une telle précision pour décrire cet aspect fondamental de l'après-guerre. Pour autant ses centres d'intérêt ne se focalisent pas seulement sur le versant matériel de la Reconstruction. Il se veut aussi le témoin du retour à la normale. Vie religieuse et monde associatif  lui en offrent la possibilité. La fête de la moisson organisée par la JAC à Zetting en 1946 et l'arrivée solennelle des cloches à Sarreguemines en 1947 attestent d'une ferveur populaire fort représentative de l'époque. Au niveau associatif, c'est le cyclisme qui tient une place de choix grâce à l'organisation de courses épiques. Le 27 juillet 1947, il plante par exemple sa caméra à Welferding et, sous une pluie battante, relate le passage du tour de France. Les fêtes nautiques et accessoirement les manifestations aéronautiques complètent la renaissance des activités ludiques. Enfin, André Poinsignon sait très bien rendre compte du lancinant tiraillement entre la célébration respectueuse du passé qu'expriment les multiples manifestations en hommage aux victimes de la guerre et la foi inébranlable en l'avenir qu'incarne à merveille la dynamique et flamboyante foire-exposition de 1949. Le tout se fait sous la figure tutélaire de Robert Schumann qui, comme à son habitude, sait concilier les antipodes.


Didier HEMMERT 


 

  • dallem.jacqueline@gmail.com
Salle de l'Hôtel de Ville Sarreguemines
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